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Squalène-hopène cyclase

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Squalène-hopène cyclase
Description de cette image, également commentée ci-après
Structure d'une squalène-hopène cyclase d'Alicyclobacillus acidocaldarius (en) (PDB 2SQC[1]). La surface de la membrane est indiquée par un trait bleu.
N° EC EC 5.4.99.17
N° CAS 76600-69-6
Activité enzymatique
IUBMB Entrée IUBMB
IntEnz Vue IntEnz
BRENDA Entrée BRENDA
KEGG Entrée KEGG
MetaCyc Voie métabolique
PRIAM Profil
PDB RCSB PDB PDBe PDBj PDBsum

Une qualène-hopène cyclase, ou SHC, est une isomérase qui catalyse les réactions :

squalène    hop-22(29)-ène ;
squalène + H2O    hopan-22-ol.

Cette enzyme est présente chez les procaryotes, où elle joue un rôle important en assurant l'interconversion d'une molécule de squalène, linéaire, en hopène et hopanol, triterpènes pentacycliques, dans un rapport 5:1[2],[3],[4],[5],[6]. On la trouve chez un grand nombre de bactéries mais c'est chez la bactérie thermophile Alicyclobacillus acidocaldarius (en) qu'elle est le plus facilement isolée[7].

Les hopanoïdes jouent chez les bactéries un rôle physiologique semblable à celui des stérols chez les eucaryotes en modulant la fluidité et la perméabilité des membranes biologiques. Chez les procaryotes, ils stabilisent les membranes en présence de température élevées et d'acidité extrême du fait de leur structure polycyclique rigide[8]. Ainsi, l'expression de la squalène-hopène cyclase est activée chez certaines bactéries placées dans un environnement chaud ou acide[9],[10].

On pense que la squalène-hopène cyclase est à l'origine de ombreuses classes de stérol cyclases d'eucaryotes et de procaryotes[6]. Les oxydosqualène cyclases, analogues de cette enzyme chez les eucaryotes, ont besoin d'oxygène pour leurs réactions, indiquant une évolution ultérieure de ces protéines, remontant à une époque où l'atmosphère contenait de l'oxygène ; le fait que la squalène-hopène cyclase fonctionne dans un environnement anoxique suggère qu'elle soit bien plus ancienne[11].

Squalène.
Hopène.

Fonctionnement et site actif[modifier | modifier le code]

La formation du squelette hopène est l'une des réactions élémentaires les plus complexes de la biochimie[12]. 13 liaisons covalentes sont rompues ou formées en une seule étape, 9 centres chiraux sont constituées, et cinq cycles sont fermés[13]. La qualène-hopène cyclase catalyse en effet la conversion d'un composé à chaîne ouverte, le squalène, en triterpènes pentacycliques, l'hopène et l'hopanol, ces deux produits étant respectivement formés avec un ratio 5:1.

La biosynthèse de l'hopène commence par la cyclisation du squalène en une configuration pré-chaise se poursuivant par la formation de cinq liaisons carbone-carbone[14]. La formation des cycles est finalisée avec l'élimination d'un proton depuis les groupes méthyle terminaux qui alternent sur le squalène à l'aide d'une molécule d'eau[5]. Cette molécule d'eau détermine également la nature du produit de la réaction selon qu'elle reçoit un proton du groupe méthyle en position 29 ou 30 pour former de l'hopène, ou qu'elle cède un groupe hydroxyle en position C-22 du cycle A. D'autres molécules d'eau interviennent en accentuant la polarisation et en formant des liaisons hydrogène entre sept résidus d'acides aminés de l'enzyme : les résidus Thr41, Glu45, Glu93, Arg127, Gln262, Trp133 et Tyr267.

Il y a très peu de changements conformationnels au cours de la formation des cycles A à D. C'est la raison pour laquelle cette réaction ne requiert par d'intermédiaires et peut être réalisée en une seule étape. La formation du cycle E est cependant bloquée par une barrière d'entropie, ce qui peu expliquer qu'il soit absent des stéroïdes tétracycliques[5].

Le site actif de la squalène-hopène cyclase est situé dans une cavité centrale de la région voisine de la membrane, cavité à laquelle le substrat accède par un canal apolaire[15]. Le site actif est entouré par des résidus aromatiques qui forment une cavité bien adaptée à la molécule de squalène repliée dans une conformation fonctionnelle. Le mécanisme réactionnel fait intervenir un couple de résidus d'aspartate et d'histidine pour amorcer la cyclisation en protonant le C-3 et déprotonant le C-29, ce qui fait intervenir une succession de carbocations intermédiaires[2],[16]. Une mutation affectant ce résidu d'aspartate est susceptible d'inactiver l'enzyme[17].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) K. U. Wendt, A. Lenhart et G. E. Schulz, « The structure of the membrane protein squalene-hopene cyclase at 2.0 A resolution. », Journal of Molecular Biology, vol. 286, no 1,‎ , p. 175-187 (PMID 9931258, DOI 10.1006/jmbi.1998.2470, lire en ligne)
  2. a et b (en) Tsutomu Hoshino et Tsutomu Sato, « Squalene–hopene cyclase: catalytic mechanism and substrate recognition », Chemical Communications, no 4,‎ , p. 291-301 (PMID 12120044, DOI 10.1039/B108995c, lire en ligne)
  3. (en) Tsutomu Hoshino, Schin-ichi Nakano, Tomohiro Kondo, Tsutomu Sato et Aya Miyoshi, « Squalene–hopene cyclase: final deprotonation reaction, conformational analysis for the cyclization of (3R,S)-2,3-oxidosqualene and further evidence for the requirement of an isopropylidene moiety both for initiation of the polycyclization cascade and for the formation of the 5-membered E-ring », Organic & Biomolecular Chemistry, vol. 2, no 10,‎ , p. 1456-1470 (PMID 15136801, DOI 10.1039/B401172d, lire en ligne)
  4. (en) Tsutomu Sato, Masanori Kouda et Tsutomu Hoshino, « Site-directed Mutagenesis Experiments on the Putative Deprotonation Site of Squalene-hopene Cyclase from Alicyclobacillus acidocaldarius », Bioscience, Biotechnology, and Biochemistry, vol. 68, no 3,‎ , p. 728-738 (PMID 15056909, DOI 10.1271/bbb.68.728, lire en ligne)
  5. a b et c (en) Dirk J. Reinert, Gianni Balliano et Georg E. Schulz, « Conversion of Squalene to the Pentacarbocyclic Hopene », Chemistry & Biology, vol. 11, no 1,‎ , p. 121-126 (PMID 15113001, DOI 10.1016/j.chembiol.2003.12.013)
  6. a et b (en) Ann Pearson, Meytal Budin et Jochen J. Brocks, « Phylogenetic and biochemical evidence for sterol synthesis in the bacterium Gemmata obscuriglobus », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 100, no 26,‎ , p. 15352-15357 (PMID 14660793, PMCID 307571, DOI 10.1073/pnas.2536559100, lire en ligne)
  7. (en) Brigitte Seckler et Karl Poralla, « Characterization and partial purification of squalene-hopene cyclase from Bacillus acidocaldarius », Biochimica et Biophysica Acta (BBA) - General Subjects, vol. 881, no 3,‎ , p. 356-363 (DOI 10.1016/0304-4165(86)90027-9, lire en ligne)
  8. (en) Elmar L. Kannenberg et Karl Poralla, « Hopanoid Biosynthesis and Function in Bacteria », Naturwissenschaften, vol. 86, no 4,‎ , p. 168-176 (DOI 10.1007/s001140050592, Bibcode 1999NW.....86..168K, lire en ligne)
  9. (en) G. Ourisson, M. Rohmer et K. Poralla, « Prokaryotic Hopanoids and other Polyterpenoid Sterol Surrogates », Annual Reviews, vol. 41,‎ , p. 301-333 (PMID 3120639, DOI 10.1146/annurev.mi.41.100187.001505, lire en ligne)
  10. (en) Hermann Sahm, Michel Rohmer, Stephanie Bringer-Meyer, Georg A. Sprenger et Roland Welle, « Biochemistry and Physiology of Hopanoids in Bacteria », Advances in Microbial Physiology, vol. 35,‎ , p. 247-273 (PMID 8310881, DOI 10.1016/S0065-2911(08)60100-9, lire en ligne)
  11. (en) M Rohmer, P Bouvier et G Ourisson, « Molecular evolution of biomembranes: structural equivalents and phylogenetic precursors of sterols », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 76, no 2,‎ , p. 847-851 (PMID 284408, PMCID 383070, DOI 10.1073/pnas.76.2.847, lire en ligne)
  12. (en) Gabriele Siedenburg et Dieter Jendrossek, « Squalene-Hopene Cyclases », Applied and Environmental Microbiology, vol. 77, no 12,‎ , p. 3905-3915 (PMID 21531832, PMCID 3131620, DOI 10.1128/AEM.00300-11, lire en ligne)
  13. (en) E. J. Corey, S. P. Matsuda et B. Bartel, « Isolation of an Arabidopsis thaliana gene encoding cycloartenol synthase by functional expression in a yeast mutant lacking lanosterol synthase by the use of a chromatographic screen », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 90, no 24,‎ , p. 11628-11632 (PMID 7505443, PMCID 48037, DOI 10.1073/pnas.90.24.11628, lire en ligne)
  14. (en) Yi Feng Zheng, Ikuro Abe et Glenn D. Prestwich, « Inhibition Kinetics and Affinity Labeling of Bacterial Squalene:Hopene Cyclase by Thia-Substituted Analogues of 2,3-Oxidosqualene », Biochemistry, vol. 37, no 17,‎ , p. 5981-5987 (PMID 9558334, DOI 10.1021/bi9727343, lire en ligne)
  15. (en) Yang Gao, Richard B. Honzatko et Reuben J. Peters, « Terpenoid synthase structures: a so far incomplete view of complex catalysis », Natural Product Reports, vol. 29, no 10,‎ , p. 1153-1175 (PMID 22907771, PMCID 3448952, DOI 10.1039/C2NP20059G, lire en ligne)
  16. (en) K. Ulrich Wendt, Karl Poralla et Georg E. Schulz, « Structure and Function of a Squalene Cyclase », Science, vol. 277, no 5333,‎ , p. 1811-1815 (PMID 9295270, DOI 10.1126/science.277.5333.1811, JSTOR 2893840, lire en ligne)
  17. (en) Corinna Feil, Roderich Süssmuth, Günther Jung et Karl Poralla, « Site‐Directed Mutagenesis of Putative Active‐Site Residues in Squalene‐Hopene Cyclase », European Journal of Biochemistry, vol. 242, no 1,‎ , p. 51-55 (PMID 8954152, DOI 10.1111/j.1432-1033.1996.0051r.x, lire en ligne)